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(Pas le) Centre Ernesto Che Guevara
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9 octobre 2007

Dix controverses sur Che Guevara

Dix controverses sur Che Guevara
LEMONDE.FR | 09.10.07 | 07h18  •  Mis à jour le 09.10.07 | 10h43
   
La vie d'Ernesto Guevara de la Serna, dit "Che", nourrit toujours une suite de controverses entre ses partisans et ses adversaires. La prolifération d'ouvrages historiques, de pamphlets et d'hagiographies n'y change rien, au contraire : les faits les plus simples de l'existence du "guérillero héroïque", selon la mythologie officielle cubaine, semblent devenus définitivement incertains.

1. Quand est-il né ?

Son acte de naissance porte la date du 14 juin 1928. Mais son meilleur biographe, Jon Lee Anderson, affirme que sa mère a retardé la déclaration de sa naissance, survenue en fait le 14 mai 1928, afin de masquer qu'elle était enceinte lors de son mariage.

2. A-t-il adhéré à un parti communiste ?

Compagnon de route du Parti communiste guatémaltèque en 1953-1954, Che, selon les archives du comité central du Parti communiste d'Union soviétique, adhère en 1957 en compagnie de Raul Castro au PSP, le parti des communistes cubains. Mais pour beaucoup d'historiens, il n'a jamais fait acte d'adhésion, se contentant d'être un acteur du rapprochement du castrisme avec le PSP, une fois le pouvoir conquis à La Havane. Seule certitude : il a quitté Cuba lorsque Fidel Castro crée formellement le Parti communiste cubain en octobre 1965.

3. A-t-il été un bourreau ?

Che relate, dans un passage de son journal de la guérilla censuré par les autorités cubaines, qu'il s'est porté volontaire pour réaliser la première exécution décidée par les guérilleros et qu'il a tiré une balle de revolver dans la tête d'un condamné. Devenu, après la victoire des barbudos, commandant en chef de la caserne havanaise de la Cabana, il a mis en œuvre plus du quart des six cents exécutions capitales de l'année 1959. Etait-il un superviseur lointain de cette tâche ou au contraire un chef s'acquittant d'un suivi de détail au jour le jour ? La question n'est pas tranchée.

4. A-t-il rompu ouvertement avec Moscou ?

Che doutait de la générosité du communisme orthodoxe envers le tiers-monde. Cette position n'est pas discutée, mais pour certains, il ne l'expose pas franchement, tandis que d'autres jugent qu'il fait preuve de courage dans son discours prononcé en février 1965 à Alger, en sommant les pays socialistes de "liquider leur complicité tacite" avec les pays capitalistes.

5. Quelle est sa relation avec Fidel Castro à la fin de sa vie ?

Che n'apparaît plus en public à son retour d'Alger, en mars 1965. Lors du congrès qui scelle la création du Parti communiste cubain, Fidel Castro lit la lettre qui devait être tenue secrète annonçant que Guevara a décidé de renoncer à toutes ses fonctions et de quitter Cuba. Che est fou de rage. A son retour du Congo (1966) et avant son départ pour la dernière guérilla en Bolivie, il vit à nouveau secrètement à Cuba. Pour les uns, Fidel fait tout pour éloigner irréversiblement un compagnon dont les positions compliquent sa relation avec l'Union soviétique, fournisseur d'une aide indispensable. Pour les autres, Che renonce de lui-même à devenir dirigeant d'un gouvernement révolutionnaire, afin de porter la révolte sous d'autres cieux.

6. Est-il responsable de l'échec de la guérilla au Congo en 1965 ?

Fidel Castro a choisi le théâtre de cette opération. Che est son opérateur sur le terrain. La perte de l'appui de la Tanzanie, indispensable pour disposer de bases sûres, entraîne la fin de cette guérilla qui s'achève par une retraite et l'abandon de compagnons sur le terrain. Che est-il victime de cette dynamique géopolitique qui interrompt ses efforts ou bien, comme l'affirment ses adversaires, sa déroute est-elle déjà acquise compte tenu de son incompétence face aux réalités africaines ?

7. A-t-il été soutenu quand il combattait en Bolivie ?

Pas de radio, un armement médiocre, le retrait anticipé de l'agent cubain chargé d'assurer la liaison avec la guérilla à partir de la capitale bolivienne : Che combat sans appui logistique en Bolivie. Est-ce sur décision de Fidel Castro ou parce que le "département Amériques" du comité central du Parti communiste cubain a failli dans sa tâche ? Selon l'interprète traduisant les propos de Fidel Castro à Alexis Kossyguine, premier ministre soviétique, en juillet 1967, le leader cubain affirme : "Le camarade Guevara se trouve maintenant en Bolivie. Mais nous ne participons pas directement à cette lutte."

8. Qui a donné l'ordre de l'exécuter après sa capture ?

Trois thèses s'affrontent. Felix Rodriguez, un réfugié cubain travaillant pour la CIA et présent auprès des troupes boliviennes, affirme qu'il a fait exécuter Che, conformément à un ordre venu de La Paz. Le capitaine Gary Prado Salmon, placé à la tête de l'unité bolivienne qui a capturé Che, affirme que c'est son supérieur, le colonel Joaquim Zenteno Anaya, qui lui en a donné l'ordre, sur instruction du président bolivien. Mais plusieurs témoignages, y compris des enquêteurs du Pentagone, affirment que c'est Gary Prado qui a de son propre chef décidé de l'exécution.

9. Combien a-t-il eu d'enfants ?

Officiellement cinq : une fille, Hilda, de son premier mariage ; deux filles, Aleida et Celia, et deux garçons, Camilo et Ernesto, de son second mariage. La rumeur lui attribue la paternité d'autres enfants à Cuba, notamment un écrivain et poète opposant au régime, Omar Perez.

10. Où se trouve sa dépouille mortelle ?

Le 12 juillet 1997, les restes du Che ont été placés dans le mausolée bâti pour lui, à Santa Clara, par les autorités cubaines. Mais l'authenticité de cette dépouille mortelle exhumée par des chercheurs cubains d'une sépulture clandestine, près de l'aéroport de Vallegrande, est âprement discutée. Pour certains, le "guérillero héroïque" reste prisonnier de la tombe anonyme où les militaires boliviens l'ont placé, afin de dissimuler son exécution.

Références bibliographiques

John Lee Anderson, Che Guevara, a Revolutionary Life, Grove Press, 1997.

Aleksandr Fursenko et Timothy Nafatli, One Hell of a Gamble, Norton and Company, 1998.

Nery Butterfield Ryan, The Fall of Che Guevara, Oxford University Press, 1998.

Gary Prado Salmon, La Guerilla inmolada, Imprenta Sirena.

Jorge Castaneda, Vie et Mort de Che Guevara, Grasset & Fasquelle, 1998.

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3222,36-964489,0.html

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