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14 août 2009

La crise économique bouscule à nouveau le modèle cubain

La crise économique bouscule à nouveau le modèle cubain
LE MONDE | 14.08.09 | 14h30  •  Mis à jour le 14.08.09 | 14h30

Trois ans après la maladie qui l'a écarté du pouvoir, Fidel Castro a fêté, jeudi 13 août, ses 83 ans, dans un climat morose : Cuba traverse la pire crise économique depuis la "période spéciale" qui avait suivi l'implosion de l'URSS, l'ex-soutien communiste. Lors de son discours de clôture de la session parlementaire début août, Raul Castro, qui a pris officiellement la relève de son frère aîné en février 2008, a indiqué que son pays, à court de devises, a dû rééchelonner ses dettes auprès de ses créanciers étrangers.
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Les autorités désignent deux grandes causes à la crise actuelle. En 2008, trois ouragans ont ravagé l'île, provoquant des dégâts évalués par La Havane à 10 milliards de dollars (7 milliards d'euros), soit 20 % du produit intérieur brut (PIB). En raison des destructions subies par les récoltes, Cuba a dû presque doubler ses importations alimentaires (payées en devise), principalement en provenance des Etats-Unis depuis que Washington a exclu ce type de produits de l'embargo imposé à l'île depuis 1960.

Cuba est par ailleurs touché par la récession mondiale. Le prix du nickel, son principal produit d'exportation, s'est effondré et les touristes y font des séjours plus courts tout en y dépensant moins, même si leur nombre devrait se rapprocher cette année du record de 2008 (2,35 millions de personnes).

Signe de la gravité de la crise, Raul Castro a prévenu, dans son discours, que l'Etat allait mettre fin "aux allocations excessives", afin que "les dépenses sociales soient conformes avec nos possibilités réelles". Avec l'éducation et les soins de santé (gratuits pour tous), le social est l'un des acquis de la révolution de 1959, auquel le Lider Maximo n'avait jamais touché.

L'annonce de ces prochaines coupes budgétaires intervient après une série de restrictions d'autant plus douloureuses que les Cubains vivent avec un salaire moyen équivalant à 20 dollars par mois et sont rationnés depuis des lustres, tandis que des pénuries de produits de base, comme l'huile, réapparaissent. Après avoir repoussé de cinq ans l'âge de la retraite (à 65 ans pour les hommes et 60 ans pour les femmes), le gouvernement a imposé, début juin, des mesures pour économiser l'énergie : les bâtiments publics sont privés d'air conditionné, beaucoup d'usines arrêtent la production durant les pics de consommation d'électricité et les agriculteurs sont invités à "préférer les boeufs aux tracteurs" pour cultiver la terre. L'île couvrait 47 % de sa consommation de pétrole par sa propre production, mais celle-ci a diminué au dernier trimestre, le Venezuela d'Hugo Chavez comblant en partie, à un tarif préférentiel, le reste des besoins.

"La terre est là et attend votre sueur !", a martelé Raul Castro. Afin de réduire la dépendance alimentaire de son pays, il a tardivement imposé le premier des "changements structurels" qu'il avait annoncés en 2007 : la distribution de terres de l'Etat à de petits producteurs. Jusqu'en 2008, la moitié des terres arables de l'Etat étaient en friche et 60 % des aliments produits à Cuba l'étaient par des agriculteurs "privés", exploitant 35 % des terres. Commencée en 2008, cette distribution a permis à 80 000 candidats de se voir attribuer des lopins. Le gros des demandes n'étant pas satisfait en raison des lenteurs de l'administration, Raul Castro vient de réclamer une accélération de ce programme élevé au rang de "priorité nationale".

A ceux qui seraient tentés de voir dans cette "décollectivisation" une inflexion capitaliste, Raul Castro a répondu qu'il n'avait pas été désigné à la présidence "pour restaurer le capitalisme à Cuba", mais pour "défendre, maintenir et perfectionner le socialisme". "Le système cubain n'est pas négociable", a-t-il ajouté, s'adressant nommément à Hillary Clinton, chef de la diplomatie américaine, et à l'Union européenne (UE), accusées de "réclamer des gestes unilatéraux pour démonter le régime social et politique" de son pays.

En juillet, Mme Clinton avait réclamé des "élections libres" et la libération des prisonniers politiques cubains (208, selon le dernier décompte de la commission cubaine pour les droits de l'homme et la réconciliation, illégale mais tolérée). De son côté, dans l'espoir d'encourager Cuba à réaliser des progrès en matière de démocratie et de droits de l'homme, l'UE a levé en octobre 2008 les sanctions qu'elle lui avait imposées en 2003, lors de l'arrestation et de la condamnation de 75 dissidents.

Fait rarissime, le quotidien officiel Granma a évoqué à sa "une", le 5 août, les manifestations spontanées et les heurts qui avaient éclaté à La Havane en 1994, au pire des restrictions de la "période spéciale". Arrivé précipitamment en Jeep, Fidel Castro avait alors réussi à calmer les protestataires en dialoguant avec eux. "Ce fut une grande victoire et un avertissement à ceux qui tentent de s'élever contre la révolution", conclut Granma. Le pouvoir, qui vient de déplafonner les salaires et de réduire les prix de vingt-quatre produits de base, craint-il que les mêmes causes produisent les mêmes effets ? Si de tels mouvements d'humeur devaient se reproduire, Fidel Castro, dont l'état de santé relève du secret d'Etat, ne serait plus en mesure de rééditer l'exploit de 1994.

La crise économique bouscule à nouveau le modèle cubain - Opinions - Le Monde.fr
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2009/08/14/la-crise-economique-bouscule-a-nouveau-le-modele-cubain_1228523_3232.html

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