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6 août 2009

A La Havane, la crise fait suer les Cubains

A La Havane, la crise fait suer les Cubains
Hector Lemieux, envoyé spécial à La Havane
06/08/2009 | Mise à jour : 14:52 | Commentaires 3 | Ajouter à ma sélection

REPORTAGE - Le président cubain a reporté sine die le VIe congrès du Parti communiste, prévu en fin d'année, pour mieux lutter contre la crise économique que traverse l'île. La Havane multiplie les mesures d'économies drastiques.

Sur le Prado, la longue promenade ombragée de La Havane, les Cubaines ont ressorti leurs éventails. Accablé par une crise énergétique sans précédent depuis les années 1990, Cuba transpire à grosses gouttes. Yuleidy, une élégante fonctionnaire de la station d'autobus Viazul, peste contre la chaleur accablante. «Un nouveau plan d'économies oblige les entreprises à couper les climatiseurs de 8 heures jusqu'à 13 heures. Depuis plusieurs mois, nous avons des difficultés d'approvisionnement en pétrole»

Près de Yuleidy, Juan, un gros garçon sanguin, s'éponge le front avec l'une de ces petites serviettes carrées que les Havanais ne quittent plus. Il attend la wawa (le bus) de Santiago et assure, sans rire : «El Commandante (Fidel) veut nous faire suer pour que nous achetions des bouteilles d'eau. Ces économies d'énergies ne sont qu'une affaire commerciale.» Près du local des chauffeurs de bus, une affichette ordonne : «Réglez la climatisation de votre bus à 22-24 degrés. Économisez, le pays en a besoin.» Sur les bas-côtés des routes, les slogans «Le socialisme, c'est aussi l'économie de l'énergie», côtoient désormais les éternels «Le socialisme ou la mort». Raul Castro a demandé aux sociétés de l'île de réduire leur consommation d'énergie. Cuba renoue avec les longues coupures de courant.

Les hôtels et les casas particulares (bed and breakfast) pour touristes ne sont pas épargnés. «Le gaspillage d'énergie est dû aux jeunes qui écoutent la musique à pleine puissance durant toute la journée. Dans ma casa particular, je demande aux touristes de n'utiliser la climatisation que le soir. Beaucoup de gens gaspillent. Ce sont des contre-révolutionnaires», affirme Maribel, la gérante. Elle a épousé un Allemand de l'Est qui l'a emmenée autrefois en voyage en URSS. «Inoubliable», se souvient-elle.

«Bien souvent 2 + 2 = 3»


D'aucuns comparent déjà l'année 2009 à la terrible «période spéciale» qui avait suivi la chute du grand frère communiste. L'économie cubaine est à l'agonie. «Nous devons impérativement faire les comptes sur ce dont dispose réellement le pays (…) déterminer ce qui doit être amélioré et même ce qui doit être supprimé (…) Dans les conditions de notre socialisme imparfait et à cause de nos propres insuffisances, bien souvent 2 + 2 = 3», a déclaré Raul Castro en fin de semaine dernière, en justifiant le nouveau report du congrès du Parti communiste cubain. Le dernier s'est tenu en 1997. Les autorités cubaines ont annoncé une réduction des dépenses tous azimuts qui n'épargnera pas même la santé et l'éducation, fers de lance du régime. Lors du 7e plénum du comité central du parti, qui s'est tenu en milieu de semaine dernière, le ministre de l'Économie et de la Planification, Marino Murillo Jorge, a expliqué la dégradation de l'économie cubaine par «l'impact combiné de la crise économique et financière mondiale et les dommages provoqués par les ouragans fin 2008».

Selon La Havane, les cyclones ont causé 10 milliards de dollars de dégâts. Outre les ouragans, l'effondrement des cours du nickel, le principal produit d'exportation de Cuba, a précipité la chute d'une économie fossilisée. Pour ne rien arranger, à la suite de défauts de paiements du gouvernement, la pétrolière canadienne Sherritt a réduit sa production dans l'île communiste. Et si les mesures adoptées par Barack Obama pour libéraliser les voyages des Cubano-Américains ont été bien acceptées par la population locale, elles ne se traduisent pas encore au quotidien par un afflux de devises.

«Les Cubains de Miami ne sont pas plus nombreux qu'autrefois», assure Ernestito, dont le taxi multiplie les allers-retours entre l'aéroport José Marti de La Havane et le centre-ville. «Je suis prêt à aider mes compatriotes, mais c'est difficile, remarque Roberto, retraité cubano-américain de Miami. J'ai acheté aux États-Unis un ordinateur portable 400 dollars pour ma fille, étudiante en médecine à La Havane. Il a fallu que je paie 500 dollars de taxes une fois arrivé ici» (à Cuba). Plus que jamais, les Cubains ont faim. Les étals des petits marchés sont encore plus vides que d'ordinaire. «Companero (camarade), achète-moi des croquettes de poulet», lance un petit garçon, la casquette rouge vissée en arrière. Dans un grand hôtel de La Havane, Pedro, un ingénieur francophile, est serveur : «La quantité et la qualité de la nourriture se sont considérablement dégradées dans les hôtels, affirme-t-il. C'est très dangereux pour notre pays,car le tourisme est la principale source de devises de Cuba.»

Raul Castro, le frère cadet de Fidel, a appelé les Cubains à «économiser le plus possible», mais il a exclu tout retour au capitalisme : «J'ai été élu pour défendre, construire et perfectionner le socialisme, pas pour le détruire.»

Le Figaro - International : La Havane sue sang et eau, malgré Castro
http://www.lefigaro.fr/international/2009/08/06/01003-20090806ARTFIG00006-lahavanesue-sang-et-eau-malgre-castro-.php

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