Orage sur la liberté de la presse
Ils croupissent dans les cachots de Cuba sans soin, dans les geôles de
Chine. Ils sont assassinés en Russie, en Asie, au Moyen Orient, en
Afrique, en Amérique du Sud. Sur tous les continents, les journalistes
rencontrent de plus en plus de difficultés pour informer.
Surtout
quand ils étudient les liens entre trafiquants de drogue et autorités,
quand ils critiquent la politique de la Russie dans le Caucase, quand
ils mettent en cause la corruption de dirigeants africains. De même
quand ils sont les témoins gênants de la violence islamiste, de son
emprise croissante sur des populations comme dans certaines régions du
Liban.
L'Association Mondiale des Journaux (AMJ) dresse un
sombre bilan de la liberté de la presse en cette journée qui lui est
consacrée. Au Niger, en Turquie, en Croatie, en Inde même : des reculs,
des violences inquiétantes apparaissent.
Entre juin 2008 et
décembre 2009 : 39 journalistes ont été assassinés dans le monde note
l'AMJ. Nombre de ces journalistes luttaient contre la violence. Ils
militaient pour que le droit remplace la force. Ils voulaient un avenir
de paix pour leur peuple et refusaient de le laisser souffrir dans
l'oubli du monde.
Beaucoup poursuivent leur tâche, bravant tous
les dangers. Au Soudan, cet hiver, 150 à 300 journalistes ont fait
grève de la faim pour protester contre la censure. Une vingtaine a été
emprisonnée. Combien d'autres subissent le même sort, dans les prisons
secrètes des dictatures ?
C'est le cas en Iran, de Roxana Saberi, journaliste irano américaine de 32 ans : « Elle a été placée en détention arbitraire sans aucune forme de transparence ni de procès », a déclaré Hillary Clinton, intervenant en sa faveur. Roxana Saberi a été condamnée. Elle proteste par une grève de la faim.
Les
engagements pris par la Chine au moment des Jeux Olympiques sont restés
lettre morte. Shi Tao est toujours emprisonné. Il n'a commis aucun
crime ! L'AMJ, invite les jeunes lecteurs à rejoindre la campagne
d'opinion pour obtenir sa libération (1).
Terrorisés, chassés,
tués : les journalistes sont les premiers visés quand un pouvoir ou une
force ne respecte pas les droits de l'homme. Dans l'ombre, des crimes
odieux sont alors commis. On le voit au Darfour, au Sri Lanka, en
République Démocratique du Congo... !
La liberté de la presse
est à l'avant-garde de la liberté des peuples. Mais elle est fragile.
Elle est souvent bâillonnée, empêchée, dénigrée avant que les peuples
ne souffrent à leur tour de l'arbitraire et de la violence. C'est pour
cela qu'il faut rendre hommage au courage de ces hommes et de ces
femmes ; à tous ceux qui s'entendent dire, comme Abdel Karim
Al-Khaiwani au Yémen : « Remercie le Ciel d'être encore vivant ! »
(1) www.wan-press.org
Jeanne Emmanuelle Hutin
http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet_-Orage-sur-la-liberte-de-la-presse-_3632-919141_actu.Htm